Tous les galants gazouillis des souïmangas
Tout l’éclatant métal des flancs du Katanga
Ne sauraient altérer le désenchantement
Du voisin Administrateur des Colonies
Car aucun safari ne peut chasser vraiment
L’inextinguible ennui de cette vie honnie
Peut-il se raccrocher à la petite tombe
Sur le jardin abandonné le jour succombe
La croix blanche est plantée tout près de la maison
Monsieur ne rentre plus dans cet endroit sans âme
Tandis que Madame boit plus que de raison
Dans des bras indolents elle s’offre sans flamme
Le souvenir s’avère un lancinant sanglot
Hanté par les photos d’un défunt angelot
Monsieur trouve sur la couche d’une Africaine
Un bref instant de joie avant d’être repris
Par la réalité et sur sa peau d’ébène
Il pleure sans espoir d’invoquer les esprits
Ô tous les feux mourants peuvent ensanglanter
Les points d’eau quand les troupeaux craintifs vont tenter
De s’abreuver tandis que rôdent les lionnes
Les buffles les zèbres pressentent le danger
Quand le jour en déclin d’un dernier feu rayonne
A ses maux ce tableau ne peut plus rien changer
La vie sauvage depuis ces funestes fièvres
Lui paraît sans relief et pour tout dire mièvre
Parfois quand il chasse l’envie lui prend soudain
De n’être pas plus fort de vaincre la détresse
Mais manquant de courage il vit avec dédain
Rejoignant sa brune maîtresse et ses caresses
Au jardin délaissé la croix de bois pourrit
Comme un corps nécrosé l’ocre terre nourrit
Si les yeux dans l’ombre de son casque on le croise
Dans la contemplation des lointains horizons
Négligent il répond par convention bourgeoise
A un vil salut sans espoir de guérison
Les trésors rubescents des mourantes savanes
Où des troupeaux géants lentement se pavanent
Ne peuvent raisonner le permanent dégoût
De l’Administrateur qui va prendre son poste
Au mutin Fort-Rousset après Ouagadougou
Avec le scepticisme du divin Arioste
Les troupeaux craintifs © Mapomme
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