dimanche 30 juillet 2023

Sonnets sertis. Merveilles et légendes

À Gaston Leroux et à Charles Garnier

 Je ne sais pas vraiment ce qui m’émerveilla
De la belle prouesse ou du roman mythique.

Si l’opéra Garnier au sublime escalier
Surprend le visiteur par son architecture
Ses fresques ses statues sachant nos cœurs rallier
Il marqua le monde par la littérature.

Ses vastes promenoirs ont su lui concilier
Les modestes bourgeois et les hautes figures ; 
Son style novateur aujourd’hui familier
Par un spectre est hanté fiction de bon augure.

Enfant j’ai lu l’œuvre qui a ravi les arts
Nourrissant en tous lieux la fantasmagorie ;
Dans tout succès se love une part de hasard.

Un fantôme amoureux – sublime allégorie ! -
Un lac sous l’opéra qui sort de nulle part
Et de rêve mon âme était enfin nourrie.

Ce fantôme pourtant jamais ne m’effraya
Et cet étrange amour m'apparut poétique.

Merveilles et légendes © Mapomme
D'après l'Opéra et... l'opéra.

samedi 29 juillet 2023

Sonnets sertis. Les années de pain blanc

Que de pain noir servi depuis cinquante années
Qui nous font regretter les trente ans de pain blanc !

Avant les sombres cieux ce fut l’attrape-rêves
Promis à la jeunesse en un monde nouveau
Un bonheur formaté qui jamais ne s’achève
Des avenirs cosys pour nos brillants cerveaux.

La jeunesse soufflait un vent frais de relève
En musique au ciné et jazz dans les caveaux ;
Sur les forêts en sang une nouvelle sève
Transformait en alliés tous les anciens rivaux.

On aurait pu croire qu’une vague chimère
Un affreux cauchemar dans l’ombre avait forgé
Une illusion de guerre implacable et amère.

Sur les blonds champs de blé s’étaient entr’égorgés
Les sangs futurs du monde à jamais éphémères ;
Leurs lignées désormais ne pourraient émerger.

Mais depuis ces trente ans aux splendeurs surannées
Dans l'ombre nous marchons aveugles et tremblants.

Les années de pain blanc © Mapomme
D'après une photo, a long long time ago...

vendredi 28 juillet 2023

Sonnets sertis. Une journée sublime...

C’était un jour d’été prétendument semblable
Mais à bien des égards quelque peu différent.

Un ami fréquentait une très jolie brune
Et ils voulaient aller en un lieu réputé
Une plage inouïe cernée de blanches dunes ;
Je les avais conduits sans même discuter.

La brune avait alors une amie de fortune
Que notre compagnie n’avait pas rebuté ;
Elle se fit bronzer sans retenue aucune
En Ève dont la feuille aurait soudain chuté.

S’était-elle évadée d’une toile de maître ?
Son corps me semblait né d’un souverain pinceau
Et celui du Titien je crus bien reconnaître.

La bonne fée s’était penchée sur son berceau
Le jour qui l’avait vue sur la Terre paraître
Mais Dieu avait omis le cœur et le cerveau.

J’avais jadis foulé cet édénique sable
En un jour demeurant triste et désespérant.

Une journée sublime... © Mapomme

Sonnets sertis. Une baroque soif

Admettons que nos cœurs soient brusquement épris
D’une baroque soif de vérité entière :

Notre monde irait-il soudainement bien mieux
Ou bien plongerait-il dans la sauvagerie
Car se craquèlerait son vernis harmonieux
Et le loup entrerait dans bien des bergeries ?

Se lancer au visage un sac de mots odieux
Serait un mal profond et toute ordurerie
Instillerait sans fin un venin insidieux
Rendant la vérité pis que la fourberie.

Au fond nous aimons bien caresser l’illusion
Que chacun plus ou moins ici-bas apprécie
L’humain que nous sommes sans aucune exclusion.

Nous feignons de prendre lanterne pour vessie
Buvant les simagrées versées à profusion
Et traitons un menteur tel un nouveau messie.

L’apparence suffit à contenter l’esprit
Et évite d'emplir d'un coup les cimetières.

Se lancer au visage un sac de mots odieux © Mapomme

jeudi 27 juillet 2023

Sonnets sertis. Parfum d'une illusion

L’amour est illusions ; une illusion de l’autre
Plus l’illusion du monde et l’illusion de soi.

Belle inconnue passant près de moi dans la rue
Peut-être es-tu un rêve et rêve est ton parfum !
Je l’ai humé après que tu sois apparue
Comme si m’imprégnait un mirage défunt.

Photos - vieilles photos – belles coquecigrues
Que de légendes nées en errant aux confins
Du rêve et du réel ! Mais la portion congrue
D’un songe suffit-elle à notre âme à la fin ?

Bercez-moi d’illusions mes amours espérées
Et mes passés tissés de foi de charbonnier !
Que d’espoirs ont filé dans la nuit sidérée

Tandis que je scrutais sous le grand marronnier
L’espace scintillant d’étoiles vénérées
Confidentes des cœurs dépourvus d’aumônier.

De sa chimère on est le premier des apôtres
Et l'ultime à défendre un songe qui déçoit..

Parfum d'une illusion © Mapomme
D'après Gustave Caillebotte et Berthe Morisot

Sonnets sertis. Un parfum de jeunesse

Quelle corne d’abondance a produit ces chansons
Qui ont accompagné ma tendre adolescence ?

Quand j’y songe aujourd’hui j’en reste confondu
Car un cycle expirant offrait son chant du cygne ;
Dès avant le printemps ce jardin suspendu
Fleurissait Babylone tel un propice signe.

Un hit chassait l’autre sublime inattendu
Et l’éphémère roi savait caduc son règne ;
Ce tube fugitif mille fois entendu
D'un précaire apogée la vanité enseigne.

Jeunesse tourmentée fleur nocturne d’un soir
En Reine de la nuit notre printemps se fane
Et brûle son parfum au cœur d’un encensoir.

Parmi ces souvenirs redevenant profane
J’ai envie d’évoquer mes émois sans surseoir   
Tels des trésors sertis dans les brumes diaphanes.

Nous extrayons des ans une amère leçon :
De la jeunesse en fleur s'est envolée l'essence.

Un parfum de jeunesse © Mapomme

mercredi 26 juillet 2023

Sonnets sertis. Le prix fait le talent

Un actuel travers rend hideux la beauté
Et le monde étant laid pourquoi chercher la grâce ?

Faut-il ternir l’éclat car tel est son destin
Et nous buter d’emblée puisque la mort nous guette ?
Les arts sont pervertis par l’or des philistins
Qui transforme la boue d’un seul coup de baguette.

Les acquéreurs souvent sont de riches crétins
Payant des gribouillis pour des sommes coquettes ;
Le débat de valeur est par le prix éteint
Mais un vieux vin n'est rien qu'une affreuse piquette.

Le cinéma offre des sujets assommants
Et le théâtre itou ! La foule béotienne
Ne comprend au sujet ni pourquoi ni comment.

Pour n’être pas moquée sur l’heure elle fait sienne
L’opinion du critique et bien que s’endormant
Ne dira son regret des œuvres fort anciennes.

Ce monde est hors de prix et même surcoté
Si l'on songe aux transferts de sportifs très voraces.


Le prix fait le talent © Mapomme

mardi 25 juillet 2023

Sonnets sertis. Rêve d’hiver austral

Que de fois j’ai rêvé de voir l’hiver austral
D’un ailleurs sans les froids qui glacent ici l’âme.

Par-delà l’équateur privé de nos frimas
Qui au septentrion se montrent versatiles
Où la folie paraît dérégler le climat
Verdoie le paradis des rêves infantiles.

Tant d’édens florissants spoliés de leurs appâts
Soumis aux appétits de promoteurs hostiles
Ont doucement connu un effarant trépas
Des stars y bétonnant un apparat futile.

Je crois à une île sans lèpre du ciment
Qui serait vierge encor sertie de blanches grèves ;
En tous lieux du globe - ange du châtiment -

La civilisation viendra prêcher sans trêve
Aux édens pervertis ses affreux boniments
Portant son cauchemar où se trouvait le rêve.

Dans le flot d’un lagon d’un calme bleu lustral
J’absoudrai mon esprit blanchi du moindre blâme.


Rêve d’hiver austral © Mapomme

dimanche 23 juillet 2023

Sonnets sertis. Triompher des tempêtes

Qu’est-ce qui fait qu’un amour peut traverser les ans
Abordant sans écueil la rive occidentale ?

Tout amour-propre il faut jeter par-dessus bord
Sachant couper en deux la poire de discorde ;
À peine le bateau s’éloigne-t-il du port
Que naissent des conflits qui souvent le sabordent.

Les charnelles passions depuis leur mont Thabor
Devront se transformer dès que l’orage barde
En oubliant toujours la raison et les torts
En désir d’obturer la moindre des lézardes.

On ne peut éviter malgré les précautions
Le soudain ouragan qui secoue le navire
Mais limiter qu’il prenne une ample proportion.

Que règne la discorde et le bateau chavire
Si à hue et à dia tout droit vers l’immersion
L’équipage choisit la solution du pire.

Comment donc augurer à partir du présent
Qu'un frêle esquif vaincra l'onde monumentale ?

La solution du pire © Mapomme

jeudi 20 juillet 2023

Sonnets sertis. Global embrasement

Le tropique en tyran a lancé ses légions
Jusqu’aux confins du pôle et brûle les campagnes.

Il fallait rebâtir les remparts démolis
Dresser des abattis des fossés des traverses ;
Or nous avons rêvé d’un danger aboli
Laissant crouler la porte et se rouiller la herse.

Puis voici l’ennemi près du fort établi
Incendiant nos cités de feux grégeois qu’il verse ;
Le bastion n’y peut rien à présent affaibli
Car l’ardente nuée les défenses transperce.

Le dragon chimérique existe bel et bien
Et soumet les cités autrefois opulentes
À son souffle brûlant des tropiques nubiens

Jusqu’aux pôles soumis à une agonie lente ;
Où sont donc les savants se disant cartésiens
Rejetant tout danger de manière ronflante ?

Leurs deniers sauvent-ils leur confiante région ?
Leur ont-ils procuré un pays de cocagne ?
Global embrasement © Mapomme
D'après Peter Jackson

mardi 18 juillet 2023

Sonnets sertis. Les défauts vertueux

Souvent je me souviens de lieux sentant mauvais
Dont la disparition aujourd’hui me chagrine.

Plus commode et bordé de chardons
Le chemin muletier avait l’odeur tenace
Du crottin parsemé dont le répugnant don
Imprégnait la sandale y imprimant sa trace.

Y passaient bruyamment de paisibles bourdons
Dont le vol ressemblait à l’affreuse menace 
Du frelon agressif piquant sans nul pardon ;
Dans la nasse du temps les souvenirs s’effacent.

Enfant chez l’épicier je n’aimais pas l’odeur
Des féculents en sacs faits en toile de jute
Dont la rusticité semblait une laideur.

Nous vivions tous alors une grande culbute
Où le plastique-roi dans sa fausse splendeur
Empoisonnait le monde en la matière inculte.

L’innovante marée des bas-prix nous sauvait :
On trouve vertueux nos achats d'origine.

Les défauts vertueux © Musée d'Aquitaine

lundi 17 juillet 2023

Sonnets sertis. Sans les haies bocagères

Dans les maisons fermées depuis des mois entiers
On ressent la touffeur d’un abandon coupable.

De nos jours en entrant dans les moindres cités
Où règne le béton dévorant la verdure
Cette affreuse touffeur marque l’atrocité
D’un fol aveuglement qui chez l’humain perdure.

Retrouver la fraîcheur et la félicité
Des rives ombragées demeurant en bordure
Des cours d’eau est pour tous une nécessité
Tant l’ambiante touffeur chaque jour nous torture.

La folie a saisi sans possible pardon
L’aveugle humanité qui toujours se rassemble
Dans de vastes cités poussant à l’abandon

Des campagnes livrées aux vils marchands du temple
Comblant le vide né ; s’il file le bourdon
Il rapporte du blé dans des champs qu’on veut amples

Sans haies bocagères. Nous pauvres héritiers
De rattraper le coup serons-nous donc capables ?

Sans les haies bocagères © Mapomme
D'après Edgar Wright

dimanche 16 juillet 2023

Sonnets sertis. Devant un café noir

Je me revois assis ce soir-là – triste soir ! -
Dans l’incapacité de verser une larme.

Ce soir j’avais perdu un de ces gens de rien
Que les bouffis d’orgueil voient parfois et méprisent ;
Dépourvu d’ambitions l’humble prolétarien
D’un monde secoué de guerres et de crises

Avait toujours choisi d’être un homme de bien
Comme son épouse ; qu’un tyran hystérise
L’Europe médusée sous drapeau hitlérien
Ne le fit pas entrer dans l’odieuse entreprise.

Cet homme avait aimé ses enfants et les leurs ;
J’avais perdu soudain un pilier de mon monde
Qui vacillait d’un coup sans que je verse un pleur.

Je l’avais vu éteint et ma peine profonde
Ne pouvait s’exprimer ; ignorant ce malheur
Le café des Palmiers bruissait de sa faconde.

Devant moi presque froid un triste café noir
Commandé sans envie n'avait plus aucun charme.
Devant un café noir © Mapomme

Sonnets sertis. Un choc émotionnel

Un malheur qui marqua à jamais notre enfance
Peut changer à jamais notre comportement.

J’avais huit ans à peine et une mort soudaine
Au fer rouge grava le sceau de la douleur ;
Un deuil inattendu avant la quarantaine
Dévasta mes parents frappé par le malheur.

Ces journées et ces nuits paraissent si lointaines :
Ma grand-mère pleurait et priait le Seigneur
Mon grand-père vidant alors sa peine
Et la rage étouffée le jour à l’intérieur.

Les parents les amis en procession sans cesse
Défilaient retournant dans la plaie le couteau
Évoquant un passé qui à la longue blesse.

Quand mon grand-père est mort j’ai gardé in petto
Sans pouvoir l’exprimer ma profonde détresse
Et sur mes pleurs j’ai mis un durable veto.

Sidéré par un deuil marquant bien plus qu’on pense
Un spleen indéfini s'insinue sourdement.

Un choc émotionnel © Mapomme

samedi 15 juillet 2023

Sonnets sertis. La tirade finale

Au soir d'aller devant le tribunal divin
En quittant les soleils de cette comédie

Je veux une tirade au sens bouleversant
Résumant tout mon être avant de ne plus être !
Que penser de ces mots mes cendres dispersant
Si j'ai quitté la scène ainsi qu'un roi sans sceptre ?

Tout comédien rêve d’un dernier trait perçant
Car l’auteur en tous lieux a su traîner ses guêtres
Se masquant pour durer et toujours s’exerçant
À l’art de l’illusion qui le fait méconnaître.

Quel prodigieux chemin plus riche qu’un roman
Fait de peines de joies de pertes de naissances :
On traverse la vie sans trop savoir comment !

La mort la magnifie par sa seule présence ;
C’est un récit empli de douloureux moments
Et de brillants éclairs qui forment son essence.

Surpassant la plume des meilleurs écrivains
Elle est le mystère auquel nul ne remédie.
La tirade finale © Mapomme

jeudi 13 juillet 2023

Sonnets sertis. Le glorieux déshonneur

Aux rebelles faussement conformistes

J’étais d’un naturel calme et plutôt soumis
Et rien ne me poussait enfant à la révolte.

Comment ce naturel soudain se dissipa ?
Je ne saurais le dire avec quelque assurance.
Tout naquit du refus de demeurer sympa
Et d’obéir à l’ordre injuste en apparence.

C’est au collège un pion qui marqua le trépas
De l’enfant qui apprit la désobéissance
Refusant la sanction et le mea culpa
Pour la faute inventée qui lui donna naissance.

J’appris à l’occasion le souverain plaisir
De ne pas accepter un pouvoir arbitraire
Fut-il d’un homme aigri frustré dans ses désirs

De peser ici-bas face à un sort contraire.
J’avais touché du doigt le pouvoir de choisir
Hors du troupeau payant le droit de m’en soustraire.

Je ne moissonnais pas à coups de compromis
Des médailles d'ivraie d'une inique récolte.

J'étais d'un naturel calme... © Mapomme

mardi 11 juillet 2023

Sonnets sertis. C’est l’entre-deux obscur

Sur la terrasse au soir je regarde la plaine
Et je connais cette heure où souffle un vent de mer.

C’est l’heure des bilans quand dans un dernier râle
Le jour meurt sur les monts dans son funèbre habit ;
Cet habit est un puits sans lueurs sidérales
Sans éclats diamantins sans chatoiements subits.

C’est l’entre-deux obscur d’une heure sépulcrale
Où l’amertume naît où tout semble maudit ;
L’obscurité descend mais n’est pas intégrale
Et le village au soir en est abasourdi.

Comme le vent se lève en héraut funéraire
Le deuil d’un morne jour destiné à l’oubli
De sa cendre emplira une urne cinéraire.

Qui donc s’en souviendra pauvre cœur affaibli
Puisqu’il n’est pas serti d’un éclat téméraire
Instant marquant ce jour à ce titre anobli ?

Mais non ! Du seul néant voyez la coupe est pleine !
Parce qu'il est défunt ce jour devient amer.

C'est l'entre-deux obscur © Mapomme

Sonnets sertis. Fait d'ombre et de lumière

Chacun possède en lui dons et malédictions
La source lumineuse et le ténébreux gouffre.

Dès que l’enfant paraît on croit son esprit pur
Telle une page vierge à notre plume offerte ;
Il naît avec la joie et la bonté bien sûr
Et une encre menant sur la voie de la perte.

On croit le modeler en pygmalions obscurs
Comme si son cerveau était matière inerte ;
On pourra indiquer tandis qu’il n’est pas mûr
Quelques leçons de vie traçant la voie ouverte.

Accablés par le poids de présumés loupés
On dira in petto « Que n’avons-nous su faire ? »
À l’obstinée question on ne pourra couper.

S’il opte pour un cap peu sûr et mortifère
Nous ne parviendrons pas à sans cesse étouper
La brèche ouverte ainsi qui sera trop sévère.

Qu’il soit vraiment mauvais est la pire affliction :
Que peut-on s'il choisit la voie sentant le soufre ?

Fait d'ombre et de lumière © Mapomme

lundi 10 juillet 2023

Sonnets sertis. Remède à l’anxiété

À ceux qui ont cédé aux sirènes funestes

Toujours imprévisible étrange et insondable
L’anxiété le prenait seul tyran ici-bas.

Au bord de l’océan qui la bouche écumante
À l’aune de son cœur habité de fureurs
Venait battre les rocs de façon véhémente
Le ressac le berçait de son chant murmureur.

Est-il plus apaisant quand souffle la tourmente
Sur l’esprit obsédé par d’anciennes erreurs
Que ce puissant fracas que les flots alimentent ?
Ce vacarme calmait ses fréquentes terreurs.

Mer d’où vient toute vie balbutiante et lointaine
Berce amoureusement tes enfants attristés !
Fais jaillir de ton sein comme d’une fontaine

Ta laiteuse écume ! Si vient à persister
Son dégoût pour la vie mets donc en quarantaine
Un mal qui fait songer à ne plus exister !

Que ton chant chasse enfin l’idée indéfendable
D'abandonner la vie refusant le combat !

Remède à l'anxiété © Mapomme

samedi 8 juillet 2023

Sonnets sertis. Un atroce bonheur

Les mines béates déclinées à l’envi
Me gênent chaque jour car tant d’elles sont feintes !

Dès que le bienheureux se frotte au quotidien
Une onde maussade vers l’harmonie converge.
Il suffit d’un tourment quelque vers rimbaldien
Et croulent les remparts que ce torrent submerge.

Se forcer à porter tel l’ancien comédien
Un masque souriant quand son esprit gamberge
Quand on veut la douleur - sans les excès sadiens -
Car feint le bonheur lasse et de pluvieuses berges

Apporteraient la brume et le doute essentiels
Hors des feux aveuglants qui notre rive baignent.
Promis au délice constant et démentiel

Privé de ces instants où parfois un cœur saigne
Ne peut-on se lasser du bleu morne du ciel
Et vouloir que l’esprit d’un soudain spleen s’imprègne ?

À l’humain ce droit simple est aujourd’hui ravi
Puisqu'il est prohibé comme le fut l'absinthe.

Le bonheur est-il un Bien de consommation ? © Mapomme
Avec un clin d'œil souriant à Yue Minjun

mercredi 5 juillet 2023

Sonnets sortis. Fay ce qu'il faudra

Fais ce qu’il faudra et du reste fous-toi ;
Fous-toi des chroniqueurs et fous-toi des sondages !

Trace dans le limon le plus droit des sillons
Et sème au bon moment les récoltes futures ;
Tu n’y gagneras rien sinon des durillons
À force de herser d'essentielles cultures.

Qu’importent les discours l’excès les postillons
De ces catons voulant frapper de leur censure
Sans succès ton projet ; ces pauvres taurillons
Subissent de l'épée de profondes blessures !

Le monde est ainsi fait de nombre de devins
Qu’aveuglent à jamais d’ineptes théories
Les menant chaque fois tout droit vers le ravin.

La Commune est restée leur fantasmagorie
Ou ils s’enivreront d’un vieux discours chauvin
Un temps rêvé rongeant leur âme endolorie.

Fais ce qu’il faudra et laisse-les pantois :
Tiens-toi en esprit fort loin des vils marchandages !

Fay ce qu'il faudra © Mapomme

Sonnets sertis. L'indignation constante

De tous côtés l’on voit fleurir l’indignation
Et d’outranciers propos sous l’ire furieuse enflent.

C’est un théâtre étrange un texte mal écrit
Où de mauvais acteurs surjouent l’épuisant drame
Du Comte et de Don Diègue en poussant de grands cris
De rage et désespoir usés jusqu’à la trame.

Dans l’intense mêlée comment faire le tri
Et qui pense vraiment au chagrin et aux larmes
Lorsque Marianne voit ses principes flétris
Qu’on lui crache dessus en méprisant ses charmes ?

Chacun sur le feu souffle et l’attise au besoin
Et les plus enragés verseront de l’essence
Ne cherchant au final qu’à marquer quelques points.

Ce Grand Guignol sanglant ignore la décence :
Lorsque tout ira mal il fera plus de foin
Ayant du vieux pays de faibles connaissances.

L’histrion politique affecte la passion
Mais le public s'en va va ou pire : il dort et ronfle !

L'indignation constante © Mapomme
D'après un célèbre manga