samedi 15 juin 2024

Élégies. À nos rêves défunts

Peu à peu, on se fait aux décès des siens
Et aux amours blessées, chutant l’aile brisée ;
On se fait à la vie, en esprit cartésien,
Sans qu’un seul jour la plaie ne soit cautérisée.

Des spectres, à foison, habitent notre esprit,
Et retentit le bruit métallique des chaînes,
De tous les destins morts que les ans nous ont pris,
Dont le poids attristant sur les dalles se traînent.

De nos déconvenues et des heureux moments,
Dissipés aujourd’hui, changeons les fleurs flétries,
Sur le marbre glacé des sombres monuments,
Avec les doigts noués et la gaieté meurtrie.

Charretier de la Mort, bien des espoirs déçus
Dans ta vieille carriole ont par malheur pris place !
Tu viens dans le brouillard les prendre à notre insu,
Et tu repars, tes roues faisant craquer la glace.

Je me souviens des noms de tous nos chers défunts,
Mais qui saura celui de chacun des ancêtres ?
La charrette demeure et marque ainsi la fin
D’un être humain que nul n’a vraiment pu connaître.

A nos rêves défunts © Mapomme

Petit clin d'œil au film de Julien Duvivier (1939) et à la nouvelle de Selma Lagerlöf (1912) que j'avais lu en 1972, publié chez Marabout fantastique. 

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