mercredi 29 juin 2011

Delta du Niger






Sur l'eau du fleuve
Grande couleuvre
Dans la lumière
Crépusculaire
Une pirogue
Lentement vogue
Sur le bras bleu
Comme les cieux

A contre-jour
Un noir contour
Glisse en silence
Doucement danse
Comme une flamme
Sur des tam-tams
Reflet tremblant
Et ondoyant

De l'enfant noir
Et vient le soir
Brouillard obscur
Qui glisse sur
Le calme bras
Du long delta






Bipède


 

Un vers
Amer
Enflamme
Mon âme
Mon cœur
A peur
Du glas
Qui bat
Malade
Aubade
Mortel
Appel
Dans l'encre
Un chancre
Nourrit
L'ennui
Suçant
Mon sang
Mes veines
Trop pleines
D'acide
Se vident
Râlant

Interminablement






Spleen © Mapomme



Le Tournant




Le malheur est passé, et sous sa cape obscure,
La plaie cicatrisée rappelle la blessure.
Dans l'encrier amer des jours privés d'envie,
Le poète noircit les choses de la vie.

Il ne peint plus la fleur, mais s'attache à son ombre ;
Toutes les demeures sont de futurs décombres.
Les plaisirs sont marqués du sceau de l'éphémère,
Comme un trait dans ses chairs livrant sa sève amère.

Tout instant de bonheur suggère la douleur ;
Les fleurs, les fruits, le ciel perdent toute couleur.
Quelques jours ont suffi, entre azur et brouillard,
Pour que l’œil de l'enfant soit celui du vieillard.

Alors, dans chaque mot, alors, dans chaque geste,
Seule existe la peine et seul le chagrin reste.
Ce chagrin inhumain, cette mortelle étreinte,
Dans le cœur oppressé, laisse sa noire empreinte.

Il cueillait ce fruit rouge, insouciant et blasé,
Délaissant la cerise, aimant plus un baiser.
La paysanne en fleur au parfum si tentant,
Dans l'herbe douce et folle, offrait ses vingt printemps.

La barque a chaviré et la vie avec elle,
Noyant dans la Seine la jeunesse éternelle.
De sa plume, depuis, coule un torrent de mots,
Coule un flot de misère en de muets sanglots.




Léopoldine trop tôt disparue © Mapomme




Jeux pervers





J'ai écrit sur ton corps
Des vers doux comme la mort
Et par nos mains avides
Nous oublions nos rides

Dans nos yeux enflammés
L’animal s’est ranimé
Sans souci du futur
Depuis tes seins blancs et durs
J'ai glissé vers ton ventre
Félin filant vers son antre
Et sur tes cuisses tendres
Différons sans plus attendre
Le bref instant d'extase
La mort qu'est l'ultime phase

Nous demeurons cloués
Sur le lit exténués
Comme un hibou étrange
A la porte d'une grange



La baigneuse tatouée © Mapomme
Merci à Ingres de m'avoir prêté son modèle



La nuit, le vent



 
Le vent balaie le flot des arbres
Le vent bat les volets ouverts
Il souffle froid comme le marbre
Et bruissent les feuillages verts

C'est la colère ivre d'hiver
Tempêtant sur le toit de tuiles
Protégez-moi du froid sévère
Murs rocailleux mon sûr asile

Le cri strident du souffle immense
Semble n’offrir aucun répit
Car Euros ce dieu sans clémence
Vient inoculer son dépit

Que revienne vienne demain
La longue ivresse et le silence
Que le vent trouve le chemin
Enfin du vide et de l'absence



Sous la tyrannie d'Euros © Mapomme



Au Détour d'une Tombe



Dans Londres la brumeuse
Une blonde pulpeuse
M'a donné rendez-vous
Dans un lieu des plus fous

Les longues croix de pierre
Grise du cimetière
Seront-elles étonnées
Du spectacle donné

Verra-t-on nous lorgner
Un feu Lord indigné
Ou mise en appétit
La défunte Lady

Sur votre froide tombe
Aux charmes je succombe
Je prends la belle blonde
Et je me fous du monde



Rendez-vous zarbi © Mapomme


La Patrouille Perdue


 
Dans le désert immense
Un légionnaire avance
Au rythme lent et las
Pénible de ses pas

L'oasis où est-elle
Son absence est mortelle
Car l'eau indispensable
Est perdue dans les sables

Tes pieds s'enfoncent lourds
Tes pas se font plus courts
Et ton souffle pesant
Avale l'air cuisant

Où est ton régiment
Tué sauvagement
Au détour d'une dune
Compagnons d'infortune

Ton sort n'est guère enviable
Dans le rouge erg du Diable
L'Immensité inerte
Tu vas droit à ta perte

Ta dépouille païenne
Nourrira quelques hyènes
Sur le sable infécond
Que tes os blanchiront



 



La fin du chemin © Mapomme 

Nuit d'Avril



Dans la brume feutrée qui plane
La lune pâle halo d'argent
Mime un angelot qui flâne
Masque par instant émergeant

Sous le manteau sombre des cieux
Sans fin sans fin clignent les phares
Feux décédés des mondes feux
Vestige d’un passé blafard

Dans la nuit longue et angoissante
L'écho des cœurs d'argent pâli
Cligne dans la lumière absente
La pulsion du bruit aboli

A la fenêtre ombre avalée
Par le néant vertigineux
Je vois le voile onde envolée
Etendard triste et lumineux






Sous la mante nocturne © Mapomme




mardi 28 juin 2011

Près du Ruisseau




Sur les rochers coule un ruisseau
Comme un remords calme et léger
Son chant si doux son chant si beau
Par les parois est répété

Dans l'herbe folle et frissonnante
Mollement je suis allongé
Entre mes dents rangées tranchantes
Un brin de jade est machonné

Les pieds dans l'eau limpide et claire
Me glaçant les os et le sang
Comme un couteau tranchant les chairs
J'entends comme un remords son chant

Du cristal pur j'ôte mes pieds
Ils me brûlent par mille veines
Un oiseau gris plein de pitié
Pleure son cri chante ma peine

Son chant si doux son chant si beau
A ma langueur fait un écho





Comme un remords calme et léger © Mapomme

Dans un bled du Maroc




Deux vieillards marocains
Parlent avec les mains
Assis au pied d'un mur
Au blanc écru dur

Dans l'ombre protectrice
Comme de vieux complices
Ils rient du temps qui passe
Lumineux sur la place

Le soleil éclatant
Verse son flot ardent
Sur les touristes las
Suant à chaque pas

Aux rives parfumées
De Méditerranée
Les deux amis d'enfance
Rient de leurs confidences

Dans l'odeur enivrante
Du doux thé à la menthe
Ils entrevoient le ciel
Dans un gâteau au miel

Demain on les verra
Comme hier siéger là
Merveilleux évadés
D'un siècle démodé





Deux amis © Mapomme
d'après une photo trouvée sur le Net

Le Danseur Etoile




Du cercle de lumière
Jaillit un vif éclair
Un danseur teint le ciel
Eternel immortel

Entre deux entrechats
Déployant ses longs bras
Il nous peint des étoiles
Peu à peu qu'il dévoile

Dans l'espace infini
De sa chorégraphie
Il livre l'absolu
Secret de l'Inconnu





Danseur-étoile © Mapomme