samedi 30 avril 2016

Rimes de saison. Méditations de la tortue

Le fil de la pensée en ce monde agité
Dans les transports publics rend les rêves communs 
Les décors défilent pied au plancher comme un
Tableau abstrait tournant avec vélocité

Je marche chaque jour promeneur nonchalant
Spectateur assidu des changements infimes
De la nature mouvante et je trouve sublime
La feuille de chêne sur sa branche tremblant 

Au pas de la tortue je forge des images
Bouquets de mots sertis en des tons assortis
Taiseux dans le calme flâneur introverti
Perscrutant une idée sans cesse en braconnage

En lézard au soleil la lenteur m’avantage
Et l’empressé stressé passe à tombeaux ouverts
En loupant l’épervier partant du chêne vert
Les feuilles frissonnant tout près de l’ermitage

Le pas offre le temps de la méditation
À la tortue qui sort un jour de sa coquille
Et qui se carapate au milieu des jonquilles
Le pas exorcise l’emprise des passions
 
 Méditations de la tortue © Mapomme

samedi 23 avril 2016

Rimes de saison. Élévation

L’épervier s’élance dans l’air l’aile pesante
Avant de rejoindre l’azur immaculé
Comme lui le rêve s'escrime à décoller
Puis gonfle ses voiles vers les cimes grisantes

Où soufflent les brises fraîches et parfumées
Exhalées des rives de benjoin de santal
Tandis que s’étale  de verre et de métal
La ville aux tristes rues lits des vies embrumées  

Loin sous nos corps légers en pieuvre minuscule
Dont les tentacules ne peuvent menacer
Celui qui vers l’Éther aura pu s’élancer
Pour voir l’ersatz de vie aux désirs ridicules

Et ainsi a saisi l’irraison qui régit
Le navrant quotidien sans espoir de navire
Pour apaiser le spleen qui dans nos têtes vire
Sans horizon nouveau que le soleil rougit

Mais comme l’épervier laisse l’apesanteur
Le rêve s’interrompt et sur le sol se pose
Abandonnant l’ivresse et nos cœurs se nécrosent
Oubliant de l’ambre l’inégalée senteur
 
Élévation © Mapomme 


mardi 19 avril 2016

Rimes de saison. L’éphémérité de l’effet mérité

Parfois dans la quiétude on rencontre la grâce
Avec rien à ôter et rien à ajouter
Plume en équilibre indélébile trace   
Ignorant sur l’instant cette félicité

Vespéral silence rêveur sur la terrasse
Dans le chant des oiseaux qui encensent l’été
Avec le lac placide et la vue qui embrasse  
Les vergers de la plaine aux bataillons fruités  

Ou un film affalé sur le vieux canapé
Avec deux trois amis en avalant sur place
Une pizza livrée et sans jamais zapper
En oubliant l’heure qui discrètement passe

On ne comprend qu’après lorsqu'on se trouve happé
Par le morne ordinaire et le spleen qui nous glacent
Que l’envolé moment ne peut se rattraper  
Que la grisaille on doit souffrir de guerre lasse  

La furtive magie sitôt sentie s’efface
La conscience détruit l’éphémère beauté
 
L'effet mérité © Mapomme  

dimanche 17 avril 2016

Rimes de saison. Le monde est un matou dormant sur un coussin

En boule est le monde ce ronronnant matou
Mais il ne rêve plus et les dangers oublie
Il manque un aiguillon pour l’éveiller sur tout   
Pour sans cesse piquer sa conscience affaiblie

Il est des érudits des savants reconnus
Agitant les drapeaux d’aubes d’Apocalypse
Leurs discours trop abscons n’effraient pas l’ingénu  
Rétif à l’antithèse et à la paralipse  

Les besogneux de l’art pour joindre les deux bouts
Ne doivent pas raser un public indocile
On ne peut attendre  de les voir vent debout
Dénoncer la folie d’un sommeil imbécile

L’artiste seul pourra en usant de beauté
Celle d’une photo d’un tableau d’un poème
Questionner le dormeur le faisant sursauter
Pour éviter l’instant de la chute suprême

Sans beauté nul n’entend les chutes rugissant
Mais le chant des sirènes
Le monde ne sent pas l’Abîme menaçant
Où son dédain l’entraîne
 
Le chant des sirènes © Mapomme 

jeudi 14 avril 2016

Les 30 calamiteuses. Il suffit du refus d’un homme encor debout

Rien ne sert de brûler les poubelles des rues
Si croissent les ordures bien grasses et repues
Rien ne sert de hurler face aux murs élevés  
Sans percer cet abcès qui nous fera crever

Sans un grand horloger l’horloge se déglingue
La violence du fric et la fureur des flingues
Font résonner l’orage au cœur de nos cités  
Brisant le mensonge de la félicité

Les enragés sans cap nous frappent nous molestent
Ayons la plume prête et trouvons les mots lestes
Les arts sont des armes et la rime un rempart
Plantons dans les esprits nos idées tel un dard  

Levons nos poings serrés sans lâcher notre plume
Pour que frappent nos mots plus pesants qu’une enclume
Il suffit du cliché d’un seul homme dressé
Pour que l’Espoir brisé cesse de régresser

Il suffit d’un refus et sa flamme s’allume
 
Un seul homme debout...© Mapomme 


dimanche 3 avril 2016

Les 30 calamiteuses. Sous nos yeux insoucieux

Sous le bruit de nos pas la fourmi creuse et trime
Sans un rai de soleil un ciel à conjurer
Sans un écrit sublime ou la magie des rimes
Sans les constellations pour le temps mesurer

Tandis qu’en dieux mortels nous foulons les alpages
Leur vie n’est que labeur dépourvue de plaisir
Sans rêves de clippers de vaillants équipages
Sur l’abysse apaisant un périlleux désir

Tout un peuple est exclu des brises parfumées
Provenant des prairies des champs et des vergers
Pas d’horizon lointain de montagne embrumée
Mais l’odeur de terre qui vient les submerger  

Nous allons insouciants dans l’herbe ensoleillée
Habillés à bas prix car triment les fourmis
À l’abri des regards leurs peines mal payées
L’égoïsme a soumis nos esprits endormis
 
 Sous nos yeux insoucieux © Mapomme

samedi 2 avril 2016

Rimes de saison. Sans le nectar de la Mer de lait

Le bleu lapis décroît en brumes vespérales
À l’heure où on l’effeuille en pétales d’espoir
La brise de terre sous les nues sidérales
Fait frémir l’herbe folle en apsara du soir

Les oiseaux font silence et vient l’heure paisible
De la méditation du bilan quotidien
Sans pyrite du jour dont l’éclat d’or risible
Aveugle l’empressé sous les feux méridiens

Souvent quand l’ombre va sans bruit à la lisière
Du jour et de la nuit encre en l’eau diluant
Sa noirceur infinie je regarde en arrière
Les pétales pourris d’espoirs non concluants

Les années ont creusé des ornières profondes
Que les soleils des jours au grand jamais n’inondent
Nos monuments déserts sont couverts d’or immonde
Te souviens-tu du miel des aubes Rosamonde
 
Sans le nectar de la Mer de lait © Mapomme 


vendredi 1 avril 2016

Rimes de saison. Ondée purificatrice

Si seulement la pluie pouvait laver la Terre
Et la mélancolie infondée de nos cœurs
Pluie céleste versée d’aériens baptistères
Chassant des songes vains les amères liqueurs

Que nos édens perdus nos espoirs de Cythère
L’Âge d’Or qu’ont vanté d’antiques chroniqueurs
Comme une fange ôtée par la pluie salutaire
Quittent nos peaux souillées par ces mondes truqueurs

Nous avons tant gâché d’instants si importants
En ombres sans substance et en reflets trompeurs
Que nous devons bénir cet orage éclatant
Qui lavera l’esprit d’inutiles torpeurs
 
En chassant nos démons aux années résistant
Nous verrions le présent délivrés de nos peurs

Si seulement la pluie pouvait laver nos cœurs
 
 Ondée purificatrice © Mapomme

Sonnets. Pluies d’avril

Il pleut dans le jardin Une pluie de printemps
Pleurant en onde triste Oh larme sur la vitre
Comme un saumon revient vers les premiers chapitres
À contrejour contrecourant et contretemps

Je buvais un café au mois d’avril pluvieux
Attendant ta venue j’écrivais un poème
Dans les habits marins d’un faux Corto bohème
Dont les rêves d’ailleurs s’arrêtaient au port-vieux

Je ne me voyais pas quarante années plus tard
Buvant un café seul en ma propre demeure
Un jour d’avril semblable et sans divin retard
Pour me faire patienter un triste après-midi

Les battements de cœur avec les ans se meurent
Et les espoirs d’avril sont à jamais maudits
 
 Pluies d'Avril © Mapomme