jeudi 31 mars 2022

Amères Chroniques. Dans la grotte reclus

La tribu se trouvant en la grotte recluse
Au cœur des ténèbres a cru se protéger
D’une population allogène et intruse
Venue les affamer et ainsi les piéger.

À cet enfermement on donne pour excuse
Que de chair des humains se plaisent à manger
L’intrus dont les rites lentement se diffusent ;
Nul n’ose donc sortir en raison du danger.

Il faut que les reclus mange de la vermine
Supportant l’infection de tous leurs excréments ;
Dans la noirceur leurs yeux sont blancs comme l’hermine.

En agitant la peur des leaders véhéments
Instillent une peur qui l’esprit contamine
Et devient de la haine avec notre agrément.

Dans la grotte reclus © Mapomme

mercredi 30 mars 2022

Amères Chroniques. Les habits neufs du Tsar

Le Tsar se fit tailler des habits merveilleux
Pour que le Monde voit son extrême puissance.
Dire la vérité s’avérant périlleux
Nul n’osa exprimer la moindre réticence.

Du trésor il était assez peu vétilleux :
Despote il attendait complète obéissance
Chassant les conseillers se montrant sourcilleux
L’esprit déjà tourné vers les réjouissances.

Un modeste tailleur d’un rien se contentant
Dit : « Veste et caleçon semblent très à la mode
Et cette nouveauté vous montre omnipotent ! »

On jugea que mentir serait bien plus commode
Et le Tsar parada de ses habits content ;
De lui on se gaussa du Pôle aux antipodes.

Les habits neufs du Tsar  © Mapomme
Conte d'Andersen à la sauce russe

Amères Chroniques. Crimes et Châtiments ?

L’exécrable bêtise adore se vêtir
Des habits flamboyants de lumière suprême ;
Mais l’illusion parfois pourrait nous abêtir
En nous faisant opter pour des sanctions extrêmes.

L’absence de raison semble nous pervertir
En nous faisant céder à un fol anathème ;
Nul aveugle dessein ne se peut travestir
En une juste cause en quelque pieux système.

Vouloir bannir des films des livres des ballets
Soulignera l’excès d’une règle mauvaise
Qui nous place au niveau des tyrans les plus laids.

S’en prendre à tous les arts jamais ne nous apaise
Ni n’atteint l’exalté trônant en son palais
Et aux cœurs éclairés ces méthodes déplaisent.

Crimes et châtiments ? © Mapomme

mardi 29 mars 2022

Amères Chroniques. Pourtant chante le merle

De retour le printemps offre une odeur de soufre
Quand on voit naître à l’Est l’étrange floraison
Née de tisons du diable et lorsqu’au bord du gouffre
On plongerait au fond sans rimes ni raison.

Oh ! pourrons-nous sentir hors de la nouvelle affre
L’odeur des cerisiers en sortant des maisons ?
Au loin naissent des fleurs qui laissent des balafres
Dans des cités blessées d’un éclat hors saison.

Un merle sur un arbre avec gaieté entonne
Son doux chant printanier inconscient des tourments
Peignant d’un feu mortel un horizon atone.

Dans des fruits très bientôt il plantera gourmand
Son bec de fin gourmet du printemps à l’automne
Tandis que vers le gouffre un monde va s'armant.

Pourtant chante le merle © Mapomme

lundi 28 mars 2022

Amères Chroniques. Les ogres sont légion

Le monde est une table où un ogre s’invite
Et lorgnant sur le plat il prétend l’engloutir.
Près d’un morceau de choix on le voit qui gravite ;
Prompt à bondir dessus il désire aboutir.

Une riche région qu’on oublierait trop vite
Est le plat favori qu’il veut assujettir ;
Un reproche – croit-on — en quelque sorte évite
Ce but dont rien hélas ! ne peut le divertir.

Le monde est surpeuplé d’ogres et de vampires
Qui vous sucent la moëlle ainsi que votre temps
Tyrans du quotidien dont la nuisance empire.

Ils s’invitent chez vous ne jamais en partant
Plus pétrifiés encor que les monts de l’Épire ;
De vos efforts pourtant ils seront mécontents.
Les ogres sont légion  © Mapomme

dimanche 27 mars 2022

Amères Chroniques. Paradoxe moral

À la télé parlait l’écrivaine en promo
Qu’on présentait ainsi : enfant illégitime.
L’adjectif est choquant si on se borne aux mots :
Ces enfants vaudraient donc une inférieure estime ?

Sur quoi jugerait-on des élans anormaux
Pour ainsi qualifier une passion intime ?
Légitime est l’enfant et le pire des maux
Donne une épithète dont il est la victime.

À l’inverse en Une des journaux quotidiens
On lit légitime assorti de défense
Ou de guerre tranchant un pseudo nœud gordien.

On est apte à tuer sitôt qu’on nous offense
Et preste à condamner en vertueux gardiens
Le fruit d'une passion dont on souille l'enfance.
A l'un ira le blâme à l'autre les honneurs  © Mapomme

samedi 26 mars 2022

Amères Chroniques. La portée d’une partition

Dans la rue dévastée un instrument résonne
Et fait croire au Printemps d’avant la partition ;
Mais dans la cheminée cet hiver on tisonne
Car le vent froid d’Oural est longue punition.

En la nuit infinie les humains déraisonnent
Et seront jusqu’à l’aube en pleine contrition.
Dans des caves glacées l’Hiver les emprisonne
Féroce les livrant à la malnutrition.

Aussi dans le matin quand joue ce violoncelle
Le froid soudain décroît et ressurgit l’espoir
Dont restait dans la nuit une infime parcelle.

On ne sait les bienfaits dans des moments si noirs
Des notes égrenées comme autant d’étincelles :
Une immense portée qu'on ne peut entrevoir.

La portée de la partition  © Mapomme

Amères Chroniques. Les rêves englués dans la raspoutitsa

Avons-nous tant besoin quand fondent les banquises
De rêver d’un empire aujourd’hui disparu ?
Nous faut-il des contrées qu’on a jadis conquises
Dont le maigre profit semblerait incongru ?

L’opulence d’un temps nous apparaît exquise
Dans l’exotique azur où vole un jabiru ;
Il n’y a plus de duc de comte ou de marquise
Mais un morne pouvoir dont l’éclat a décru.

Le miroir déformant — miroir aux alouettes
Est celui d’un passé qu’un âne a réécrit
Faisant prendre pour vrai ce que son cœur souhaite.

Dans son palais glacé il peut pousser des cris
Car l’ombre du rêve fige sa silhouette :
Dans la raspoutitsa le voici circonscrit.

Raspoutitsa  © Mapomme
d' après un tableau d'Ilya Répine

vendredi 25 mars 2022

Amères Chroniques. Dania

Il pensait que jamais il ne ferait la guerre
Que cette barbarie seyait aux temps anciens ;
Ses aînés l'ont faite pour établir naguère
L’universelle paix sans ordres miliciens.

Des pirates surgis du ventre de la terre
Espèce disparue composée de vauriens
De leurs obus létaux ont criblé de cratères
Des pays détroussés dont il ne reste rien.

Il a gravé Dania sur la crosse de l’arme
Pour se remémorer l’objet de son combat
Pourquoi il fera front au feu et au vacarme
Pour lequel son aïeul voilà longtemps tomba.

Son enfant sera libre et s’il versait des larmes
Il tuera pour chasser un tyran d'ici-bas.

Dania © Mapomme

jeudi 24 mars 2022

Amères Chroniques. Dans le chaos guerrier un espoir nous éclaire

D’un archaïque mal peut-il naître un progrès
En éveillant en nous une conscience éteinte ;
Des valeurs surannées dont il reste un regret
Dont notre esprit conserve une confuse empreinte ?

Dans l’ombre et le chaos ressurgit l’intérêt
Pour des vertus flétries que l’on croyait défuntes
Qui germent en tous lieux tel un blé de guérets
Et brillent dans la nuit pour étouffer nos craintes.

Mais il faut se défier des prêcheurs excessifs
Qui voudraient se tirer dans le pied une balle
Et pousser les pouvoirs à être transgressifs.

Le plus n’est pas le mieux quand sanction est cabale ;
Dans la mesure en tout et sans être oppressifs
Œuvrons en évitant les outrances verbales.

Un espoir nous éclaire © Mapomme

mercredi 23 mars 2022

Amères Chroniques. Le fumier de la haine

Le fanatisme croît sur le lit de la haine
Comme est nourrie l’ortie par le tas de fumier.
Cet engrais est formé de misère et de peine
De soucis quotidiens de dégoûts coutumiers.

Des prêcheurs nous livrent des sermons peu amènes
Un temps où les derniers se verront les premiers
Sans tous ces corrompus qui toujours les enchaînent :
Voilà les saints écrits qu’ils viennent jérémier.

Ils peignent le jardin et l’or des Hespérides
Des jours où sont servis ambroisie et nectar
D’un passé retrouvé sans avoir pris de rides.

Le candide croira ces piètres racontars.
Or ce fumier est pauvre la terre trop aride
Et l'épi du Progrès y germe avec retard.

Le fumier de la haine © Mapomme

mardi 22 mars 2022

Amères Chroniques. Balance des paiements

Voilà un vent glacé qui nous fait frissonner
Dans nos maisons cosys bien chauffées et paisibles.
Voici des parlements venant ovationner
Un peuple courageux sans traduction visible.

Faut-il laisser crever un pays rationné
Sans rogner nos conforts de façon plus plausible ?
Peut-on par égoïsme ainsi démissionner
Et voir notre soutien devenir illisible ?

Nous pourrions faire plus et ne réalisons
Que des économies de restants de chandelle
Étant aux yeux du monde une vraie trahison.

Le Budget ne saurait s’avérer un modèle
En zyeutant à nos pieds et non à l’horizon
Lorsqu'un choix nous fait serfs soumis à la gazbelle.

Balance des paiements © Mapomme

lundi 21 mars 2022

Amères Chroniques. Les moutons d’un pâquis victimes de la rage

Un fou montrait la lune et perdant la raison
Les gens levaient la tête et soudain pris de rage
Voilà qu’ils insultaient le marqueur des saisons
Ne négligeant aucun de leurs verbaux outrages.

Les plus déterminés du haut de leur maison
Lui décochaient des traits tombant dans les parages ;
D’autres couraient perdus dans leurs péroraisons
Les yeux dardant la nuit inconscients du naufrage.

Car ils couraient joyeux tout droit vers le ravin
Et fulminaient toujours durant leur cabriole
Pour en masse chuter jouets d’un combat vain.

Les sages résistant à la folle gloriole
S’emparèrent du fou et chacun d’eux convint
Que son saut prouverait qu'il n'était qu'un mariole.

Les moutons d'un pâquis victimes de la rage © Mapomme

dimanche 20 mars 2022

Amères Chroniques. Une guerre invisible

Une guerre insidieuse ensanglante le monde ;
On n’y voit pas d’obus d’avions ou d’hélicos
Mais les populations d’une terre inféconde
Affamées sous les feux des soleils tropicaux.

Ailleurs dans les cités riches et moribondes
Hors des territoires aux déserts médicaux
On se procure une arme en vue de quelque fronde
Pour peindre sur des corps d’affreux coquelicots.

Dans des squats on s’évade à l’aide d’une dose
De paradis factice et mené par Kharon
On aborde l’Enfer pour une ultime pause.

Qu’est devenu ce monde où rien ne tourne rond
Où vers l’Abîme on court pris d’étranges psychoses
Macérant des rancœurs dans de vastes chaudrons ?

Une guerre invisible © Mapomme

samedi 19 mars 2022

Amères Chroniques. Vides sont nos greniers

On nous repeint en vert des murs rouges sang
Et le chant des oiseaux couvre celui des armes ;
Les serviles discours toujours recrudescents
Exaltent une paix émus au bord des larmes.

Ces orateurs fiévreux clament d’un ton pressant
Des arguments cinglants non dépourvus de charme
Leur argument constant et toujours renaissant
Qu’il ne faut s’alarmer au moindre des vacarmes ;

Ou que se désarmer permet de limiter
Les coûts ce qui plaira à nos économistes
Lesquels applaudiront à l’unanimité.

Vides sont nos greniers — généreux polémistes
Et quand survient soudain quelque calamité
De vos économies pourrons-nous subsister ?

Vides sont nos greniers © Mapomme

Amères Chroniques. Porter cent ans de honte

Nous plaignons l’agressé mais plaignons l’agresseur
Qui portera la croix de l’opprobre unanime
Durant un siècle entier : celle de l’oppresseur
Parce qu'un être odieux le dirige et l’anime.

Tout le peuple actuel dont chaque successeur
Sera marqué au front par l’horreur de ces crimes ;
L’innocent trouvera bien peu d’intercesseurs
Même s’il a subi des foudres qui l’oppriment.

D’autres nations jadis ont dû porter la croix
Bien que venues après une aveugle démence ;
Les jurons s’atténuent et la haine décroît.

Passent les décennies la vaine véhémence ;
Puis la vague du temps plus vite qu’on ne croit
Tel un suprême Juge accorde sa clémence.

Porter cent ans de honte © Mapomme

vendredi 18 mars 2022

Amères Chroniques. Peindre la nuit d'une aube

Tu vois : la nuit s’installe et étend son empire
Sur les rêves d’un jour où brillèrent radieux
Les soleils de midi auxquels notre âme aspire
Sans l’ombre du néant d’un oppresseur odieux.

Tandis qu’à notre perte un mal profond conspire
Déployant sur le globe un pouvoir insidieux
Peins-moi la nuit d'une aube et chasse ces vampires !
Ou compose un morceau tonique et mélodieux !

Mets donc en scène un film exaltant et lyrique
Ou compose un sonnet qui clame ton credo
Agitant le flambeau d’avenirs chimériques
Aubes des lendemains offertes en cadeau !

Les savoir possibles dans cette ombre hystérique
Fera battre nos cœurs d'un espoir crescendo.

Peindre la nuit d'une aube © Mapomme

jeudi 17 mars 2022

Amères Chroniques. Le Théâtre de guerre

Sous nos yeux effarés l’innommable est commis
Et devant ces crimes nous nous sentons coupables ;
Coupables d’accepter les maux d’un peuple ami
Et de n’avoir pas fait ce dont on est capable.

Sous le feu des obus traiter est-il permis
Pour enfin parvenir à un pacte acceptable ?
En ce cas quel sera le prix d’un compromis
S’il omet les sanctions d’un drame épouvantable ?

Pourtant quel est le prix qu’il nous faudrait payer
Pour agir en humains quand un tyran divague
Et qu’il veut simplement sans appel enrayer
L’espoir de liberté né du Printemps de Prague ?

Faut-il intervenir comme on l’a conseillé
Pour voir si le pire ne serait qu'une blague ?

Le Théâtre de guerre © Mapomme

mercredi 16 mars 2022

Amères Chroniques. Aveugles comme Œdipe

L’infime changement bien qu’un danger croissant
Est pourtant réfuté par de prudents principes ;
Mais la logique est loin des desseins sous-jacents.
On se crève les yeux comme le fit Œdipe :

La raison aveuglant tel un soleil naissant
Nous voyons l’ennemi jouant dans notre équipe
Quand bien même il tiendrait quelques propos blessants
Sortant d'un autre siècle un vieux stéréotype.

Comble de cécité dans les rues des légions
Pourtant disparates défilent et contestent
L’esprit des Lumières que tous nous protégions.

Manœuvrés les réseaux répandent cette peste
Que la Démocratie — voyez la contagion !
Est une dictature au citoyen funeste.

Les aveugles légions © Mapomme

mardi 15 mars 2022

Amères Chroniques. Les rameaux inertes sur les terres désertes

Nous confondons souvent réalisme et désirs ;
En effet chaque jour les illusions nous bercent
Où nous voyons demain fait de paix et loisirs
Sans la moindre anicroche et sans puissance adverse.

Mais les dieux — s’il en est — s’amusent à plaisir
À semer le chemin d’oubliettes diverses
Où tous ces beaux espoirs vont longuement moisir
Colombes déplumées et amoureux commerce.

Un coupable angélisme aveugle la raison
Sans gouverne menant notre monde à sa perte
Lorsqu’il ne perçoit plus ni ciel ni horizon.

Le rameau d’olivier tout flétri pend inerte
Quand l’illusion assèche ainsi qu’un vil poison
Les arbres de l'espoir sur les terres désertes.

Les rameaux inertes  © Mapomme

Amères Chroniques. Holodomor (extermination par la faim)

Les silences toujours coupables et complices
Cherchent à étouffer l’horrible vérité
Gardée sous le boisseau avec ample malice :
Le génocide ancien d’une minorité.

Le pouvoir stalinien priva avec délice
L’Ukraine de son blé et les déshérités
Ont tous crevé de faim dans un très long supplice :
Cinq millions de défunts l’avaient-ils mérité ?

On a vu les vivants livrés à la famine
Qui dévoraient les morts au comble de l’horreur
À défaut de racine ou même de vermine.

À nouveau un pouvoir vient semer la terreur
Pour rafler tous les champs comme toutes les mines
Pour voir le Monde enfin soumis et imploreur.

Holodomor  © Mapomme
d' après un tableau de Nina Marchenko

lundi 14 mars 2022

Amères Chroniques. Reclus dans les Météores

Il est un monastère en haut d’une falaise
Quasi inaccessible et propre à méditer ;
Si avant de créer en ce monde un malaise
Les saigneurs y cherchaient quelque lucidité

Le globe irait bien mieux — telle est du moins ma thèse !
Qui se voit sur la Terre en maître incontesté
S’aveugle et se nourrit d’effarantes foutaises
Honni quand il se croit perçu en majesté.

Ces ogres isolés font frissonner la Terre
Et peuvent déclencher des projets assassins
En Vieux de la montagne entouré de mystères.

Il nous faudra contrer leurs meurtriers desseins
Puis les tenir reclus dans quelques monastères
Tels d'indignes parents entre ces saints murs ceints.

Entre ces saints murs ceints  © Mapomme

vendredi 11 mars 2022

Amères Chroniques. Si vis pacem, para bellum

« Love and Peace » entend-on au nom d’un irénisme
Qui se plaît à gober qu’à table on peut charmer
Un ogre sanguinaire et vanter l’humanisme
    Par notre seul exemple enfin le désarmer.

On voit souvent le monde à travers l’étroit prisme
D’une bonté innée souhaitant s’affirmer
Où le loup opterait pour le végétarisme :
Voilà de pieux bobards par le temps infirmés.

L’ogre flaire en la paix un signe de faiblesse
Et une simple proie dans le troupeau bêlant ;
Le compromis pour lui n’a aucune noblesse.

Pourtant le pacifiste aux desseins excellents
Sans armée pour fouet ne peut tenir en laisse
Les ogres fulminants sans punir leurs élans.

Si vis pacem, para bellum  © Mapomme

mercredi 9 mars 2022

Amères Chroniques. Chérissons à nouveau ce qu’on a méprisé

Il faut parfois goûter une potion amère
Afin de savourer le goût simple d’un plat.
On voudrait l’excellence et les plats de grand-mères
Sans nul exotisme nous semblent raplaplas.

Si un amour sans heurt nous apparaît pépère
Soudain le poids des ans s’en vient sonner son glas
Et vers d’autres élans on se fera la paire
Snobant ce que jadis fervent on contempla.

Pareillement il faut les échos d’une guerre
Frappant à notre porte lorsque le dieu Vulcain
Dans son antre forge selon l’instinct grégaire
Les armements sanglants de troupes d’hellequins.

Alors on chérira cette paix de naguère
Toute pétrie du sang des vrais républicains.

Potion amère  © Mapomme
d' après un tableau d'Adriaen Brouwer

mardi 8 mars 2022

Amères Chroniques. Tri sélectif indigne

On voit se démener des citoyens du Monde
Pour envoyer des dons ou en vue d’accueillir
Des réfugiés fuyant des armées furibondes ;
De cette humanité on peut s’enorgueillir.

Sur cet élan on peut songer une seconde
Lorsqu’on voit les mêmes entrouvrant sans faillir
Des bras hospitaliers à toute tête blonde
Et jeter les brunes sans même tressaillir.

En ces temps écolo s’il est vraiment utile
De trier les déchets afin de recycler
Comme de se passer de tout achat futile
Peut-on faire le tri et sur tout renâcler ?

Nos cœurs sont barbelés de façon versatile
A certains réfugiés et sont fermés à clé.

Tri sélectif indigne  © Mapomme

lundi 7 mars 2022

Amères Chroniques. Les défunts d’Odessa ne sont pas ceux d’un film

Nous voici spectateurs muets et effarés
Voyageant dans le temps à l’époque lointaine
Où durant des années l’humain s’est égaré
À l’ombre des drapeaux d’affreux croquemitaines.

Que d’argent et de temps à longtemps préparer
Un flot de sang coulant de vivantes fontaines !
Que de budgets de mort sont venus s’emparer
Des efforts de recherche immolés par centaines !

Le destin capricieux supplicia Odessa
Lieu mythique d’un film marquant l’imaginaire
Qui dans tous les esprits son empreinte laissa ;

Un tyran échangea les rôles très binaires
Quand le libérateur s’en vint et oppressa
Un peuple paisible sous son joug sanguinaire.

Putin Crime  © Mapomme
d' après Le cuirassé Potemkine de Sergueï Eisenstein

dimanche 6 mars 2022

Amères Chroniques. Le potier sur son tour façonne l’avenir

Dans la glaise humide le potier sur son tour
Pétrira l’avenir des décennies futures
Améliorant sans fin ce monde de vautours
Où l’on tremble toujours devant des dictatures.

Son œuvre perfectible est l’unique recours
Pour préserver l’humain autant que la Nature ;
Il est semblable aux dieux qui de la boue du cours
D’un fleuve ont façonné les anciennes cultures.

Hélas ! certains potiers ne voient que le lointain
Et d’autres le passé qui jamais ne les lasse
Ignorant constamment le mal qui nous atteint :
Sur nos besoins toujours leur esprit fait l’impasse.

Qu’ils cessent de pétrir matin après matin
Un monde si distant de ce qui nous tracasse !

Le potier sur son tour façonne l'avenir © Mapomme

samedi 5 mars 2022

Amères Chroniques. Et au-delà du trait on franchit l’Achéron

Un simple demi pas et voici que l’on passe
De l’ombre aux feux d’un jour sans le fracas grondant
D’un orage lointain où l’inconnu trépasse
Sous la fureur d’un vent furibond l'émondant.

Un trait sur une carte une banale trace
Qu’un seul homme voudrait effacer cependant
Permet de n’être pas six pieds en terre grasse
Au nom d’un projet fou supposé transcendant.

La folie des hommes leur fait tracer d’un geste
Une frontière un jour afin de la franchir
Au son lourd du canon pour toute âme indigeste
Et signer des traités pour mieux s’en affranchir.

La frontière est utile et nul ne le conteste
A sauver tous les cœurs ne voulant pas fléchir.

Et au-delà du trait on franchit l'Achéron  © Mapomme

vendredi 4 mars 2022

Amères Chroniques. La nuit et le chaos

L’ombre vient du levant quand derrière les monts
S’éteint le feu du jour où nos craintes se lèvent.
Les Égyptiens croyaient que contre les démons
Du chaos le Soleil devait porter le glaive.

Quand dans l’obscurité nous allons à tâtons
L’aube d’un nouveau jour s’avère-t-elle un rêve ?
Contre le silence se heurte le bâton
Qu’aveugle on agite sans observer de trêve.

Sans nul pouvoir divin luttant contre un géant
Un ogre qui le broie — comme hier nos ancêtres
Bravèrent vaillamment les forces du néant 
Un peuple s’est dressé pour ne pas disparaître.

Si nous étions promis à l’abîme béant
Saurions-nous délaisser l'inertie du bien-être ?

Opération de Pacification  © Mapomme

jeudi 3 mars 2022

Amères Chroniques. Ensemencer les champs d'avenirs étoilés

Devons-nous renoncer à travailler la terre
Si le fruit retiré peut être décevant
Si la récolte hélas ! déçoit et nous atterre ?
Il faut continuer sous la pluie par le vent

L’apparent labeur vain de quête alimentaire ;
En des temps contraires aller toujours bravant
L’ironie du destin pour l’effort solitaire :
Défaisons sans arrêt tout lien nous entravant.

La vague patiemment a érodé la roche ;
Usons semblablement l’hostile condition ;
Que loin d’être accablé nul de nous ne raccroche.

Face aux intempéries nous avons la mission
De retourner la glèbe avec la même approche :
L'ensemencer d'espoirs sans nulle reddition.
Ensemencer les champs d'avenirs étoilés  © Mapomme
d' après un tableau de Jean-François Millet

mercredi 2 mars 2022

Amères Chroniques. Méfie-toi des beaux jours te masquant l’incertain

Ne crois pas que demain sera comme aujourd’hui
Vu que tout jour mauvais peut s’ensuivre du pire ;
Si un soleil doré depuis ce matin luit
Jamais à toute aube s’étendra son empire.

L’incertaine harmonie s’effondre dès la nuit
L’orage alors grondant sans qu’on puisse mot dire ;
Ainsi tombent sur nous des jours drapés d’ennui
Quand vague est l’avenir que nul ne sait prédire.

De doutes habité perplexe tu iras
Par des rues sinuant au gré de tes pensées
Sous les cieux obscurcis d’atroces embarras.

Des menaces sur nous sans cesse sont lancées
Et les épidémies de peste et choléra
Ne sont rien comparées à la crise insensée.

On voudrait comme toi — citoyen valeureux
Retrouver la saveur des fruits des jours heureux.

Sous les cieux obscurcis tous les fruits sont flétris © Mapomme