mercredi 30 août 2023

Sonnets sertis. Emmène-moi, Chimère !

Combien se sont jetés au cou d’une passion,
Prêts à défier l’Abîme et les obscures gorges.

« Emmène-moi, Chimère ! et défions le ravin,
Qu’importe si fatale est pour nous deux la chute !
Sans tenter le grand saut, un pur espoir est vain
Et vulnérable aussi, car drapé de volutes ! »

On peut toucher l’enfer ou frôler le divin,
Extrêmes qui souvent les cœurs faibles rebutent ;
Quand hésite l’esprit, l’amour touche à sa fin
Et se flétrit sur l’heure, aussitôt qu’il débute.

Il faut bien deux folies pour tenter l’insensé,
En affrontant l’espace et l’insondable vide ;
La folie est raison qui aide à s’élancer.

« Si notre ivresse est brève, nos deux cœurs impavides
Auront vu leur toupet bien mal récompensé :
Certains cerveaux chagrins parleront de suicide ! »

Fuyant la vacuité avec obstination,
Loin des sages tiédeurs, chaque hyménée se forge.

La Chimère © Gustave Moreau

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