lundi 17 mars 2025

Élégies. Le calme flot des jours

La vie des pauvres gens offre peu de plaisirs
Et c’est encor plus vrai quand il s’agit des femmes ;
E
lles ne possèdent rien, ni avoirs, ni loisirs,
En esclaves traitées, par des mâles infâmes.

Dans les maisons closes, les corps sont modelés
Par les mains et les ans, et leur beauté s’étiole :
Elles voient le cœur sombre, à leurs yeux révélés,
Des clients semblant doux, adeptes des torgnoles.

Lors des jours de repos, elles boivent un peu
Et, le corps relâché, fument une cibiche ;
P
arfois, les beaux habits seront les plus dégueus,
Au pieu leur révélant d’inattendus fétiches.

Le paisible ruisseau des jours, des mois, des ans
S’écoule immuable ; pourtant, les jours s’égrainent,
Presque répétitifs, mornes et peu plaisants,
Hantés d’anciens chagrins qu’à tout jamais on traîne.

Le soir, devant la glace, on ne reconnaît plus
Ce corps pétri de jours, passés à tire-d’aile ;
Si plus jeune, autrefois, cette chair avait plu
Il n’abuse personne, au feu de la chandelle.


Le calme flot des jours © Henri de Toulouse-Lautrec
(Musée Toulouse-Lautrec d'Albi)

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