lundi 18 juin 2012

Impelyon. Chassuanàma


Voici plusieurs lunes que j’ai laissé l’étang
Et son larron déchu dont la guigne perdure
Dirigeant mes pas vers les cimes du Ponant
Granitique massif issu de la verdure

Au sommet d’un des monts où Chassuanàma
L’immuable cité étale son mystère
Ceinte de hauts remparts moulés dans le magma
Que d’antiques géants en ce lieu implantèrent

Ces murs cyclopéens qu’un peuple disparu
Parvint à assembler par un obscur prodige
S’avèrent bien plus grands que je ne l’aurais cru
Car me laissent sans voix ces ultimes vestiges

De ma tour d’Argobal, j’ai souvent étudié
Cet assemblage étrange avec ma longue-vue
Mais la distance immense empêche d’apprécier
Cette démesure tout à fait imprévue

La seule explication qu’on puisse proposer
Est que les bâtisseurs disposaient d’une science
Permettant de fondre le granite rosé
Pour assembler des blocs avec cette efficience

Hélas tout ce savoir est perdu désormais
J’arpente abasourdi les ruelles pavées
Où le vent tramontin seul rompt sur le sommet
Le silence inhumain de la ville enclavée
Sacsahuamán

Eblouissant tableau où nous sommes fourmis
Un livide jeune homme âgé de trente années
Les yeux tristes cernés d’avoir trop peu dormi
Accortement discourt d’une voix raffinée

Propice à l’empathie sans les interruptions
D’agaçantes quintes signe clair de phtisie
Pardonnez je vous prie ma toux de consomption
L’air d’ici est meilleur pour cette maladie

C’est du moins ce qu’on dit au pauvre condamné
Quel triste souvenir rapporté d’un voyage
Qui va vers le tombeau sans recours m’amener
Tel un piètre trophée d’un levantin mouillage

Les râles rapaces qui caressent les cieux
Donnent au jour mourant sa dimension tragique
Semblable au noyé dans le soir silencieux
Dont la main disparait dans l’onde nostalgique

Mais Velte impassible vers la Croix de Midi
Songe à l’autre hémisphère aux plantes épineuses
Là-bas le jour se lève et c’est le paradis
De la haute-saison aux heures lumineuses

Je rêve souvent au lointain continent
Asturiale où tout est inverse à notre monde
A notre froid répond un été dominant
Quand il me faut rester en terre moribonde

En ce moment précis les bergers des plateaux
Au teint sombre et hâlé tel un roc basaltique
Des étables fumantes sortent leurs troupeaux
Ignorant par bonheur nos landes miasmatiques

Ce sont de grands gaillards puissants et vigoureux
Et aux femmes toniques s’affairant à leurs tâches
D’une santé incurable au cœur chaleureux
Rétifs à tout seigneur aux fouets et cravaches

Les rares malades du cercle tropical
De fièvre exotique de temps en temps guérissent
Dans le sombre limon remède radical
Lit que je voudrais mien avant que je périsse

C’est ce que conte Velte dans l’antique cité
Le cœur toujours rongé par la mélancolie
Quand l’azur est frappé d’atroce cécité
Que l’ultime espérance est enfin abolie

Velte sur la cime © Mapomme

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