samedi 12 décembre 2020

Elégies. Dans le gouffre profond où s’achève le temps (1)

I

Je veux peindre des cieux terriblement sublimes

Leurs nuages jamais ne seront supérieurs

À ceux qu’a façonnés le vent rageur des cimes

Aux flammes j’ai livré le ciel d’un barbouilleur

 

L’air iodé inhalé ravissait mes narines

Et cruel inspirait un appétit d’ailleurs

Les abysses pourprés des profondeurs marines

Ont sitôt tempéré mes espoirs d’orpailleur

 

Les reflets sont trompeurs pour qui cherche dans l’onde

La battée n’y trouvant que l’illusion de l’or

Paillettes dans des flots que le soleil inonde

 

Pour quelque vil éclat dois-je braver dès lors

Un gouffre d’amertume et parcourir le monde

Pour ramener une once du piètre similor ?

Les abysses pourprés © Hugo Pratt


II

Si l’or de l’illusion n’a pu te dérouter

Ô quêteur d’infini dans l’espace et l’écume

Peut-être la rumeur des immenses cités

Saura-t-elle apaiser ta naissante amertume ?

 

III

Las du théâtre abstrus d’un bataillon furieux

Qui veut qu’on le bastonne afin de mieux s’en plaindre

Je fuis cette rumeur de tout désert curieux

Car le vertige urbain me semble plus à craindre

 

La métropole gronde d’un chahut victorieux

Où la pensée ne peut jamais croître et atteindre

Les voûtes éthérées et les sommets glorieux

Le volubile essaim vient aussitôt éteindre

 

La moindre des idées qui pourrait s’éveiller

Et sur l’aile éclosant verse un plomb délétère

« De lorgner vers l’Azur c’est le prix à payer

 

Ne peux-tu donc rester cloué sur cette terre

Au lieu de côtoyer les monts ensoleillés ? »

Tout rimeur est puni d'aller en solitaire


IV

Si tu veux fuir les rues sans emboîter le pas

Loin d’une destinée par trop conventionnelle

Pour conserver ton cap sers-toi de ton compas

Hors des cercles repais ta quête obsessionnelle

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