À nos amours déçues, à nos baisers reçus,
À la rose et l’ortie, au blé et la ciguë,
Aux démons d’ici-bas, aux anges du dessus,
Nous devons notre joie et nos peines aiguës.
Tous ont rejoint pourtant les limons de l’oubli,
Nous laissant tristement qu’une photo truquée ;
La mémoire avilit ou alors anoblit
Les images passées qu’on a trop reluquées.
Les pages sont froissées et le papier jaunit
D'un livre qui s’achève, dont les derniers chapitres
Conduisent au terme, cette fin qu'on honnit,
Dont la Parque au ciseau voudrait être l’arbitre.
Nous avons su extraire, avant d’être bannis,
Le
suc de la vie qui justifie le titre.
lundi 21 juillet 2014
Sonnets. Le parcours compte plus que n’importe la fin
Sonnets. Dans les champs d’infini ensemencés d’étoiles
Dans les champs d’infini ensemencés d’étoiles
Nous aurons un sommeil tissé d’espoirs radieux
Le froid nous glacera les os jusqu’à la moelle
Car nous ne voudrons pas nous soumettre à un dieu
Évadés de la mort décédés en cavale
Dans un vaisseau fendant le vide sidéral
Nous rêverons d’ailleurs dans un caisson ovale
Refusant le repos d’un marbre sépulcral
Nous aurons tout misé sur la cryogénie
Pour filer à la barbe de l’insatiable mort
Ayant ainsi créé notre propre mesnie
Et loin des requiem pris un nouvel essor
Peut-être un jour prochain nous verra ramenés
À la navrante vie pour être d’anciens-nés
dimanche 20 juillet 2014
Sonnets. Sans le morne regret des chimères absentes
merci à Charles pour son
vers
Ils sont tous morts les insouciants et les soucieux
Qui dansaient sur les photos à la fin de la guerre
Ils ont rejoint l’enfer ou ont grimpé aux cieux
Retrouvant leurs aînés devanciers de naguère
Aussi croquons la vie comme en un fruit on mord
Nous sachant ici-bas successeurs éphémères
Sortis droit du néant y entrant par la mort
Acteurs intermittents vivants intérimaires
La connaissance est vaine et agit en poison
Gâchant l’heure présente et le bonheur fugace
Profitons de l’instant sans chercher de raison
Jouissons démunis d’un esprit trop sagace
Vers l’abysse futur Gilgamesh attristé
Va quêtant sans succès son immortalité
(Photo Robert Cohen)
samedi 19 juillet 2014
Sonnets. Pourvu que le danger apporte son épice
L’air embaumait l’épice et le ciel irradiait
L’argile et l’ocre d’un tropique exotique
Cet édénique endroit nos printemps répudiait
Aux jardins d’un docile ordre géométrique
Fi du gazon coupé que mon cœur abhorrait
Heureux qui comme Ulysse a quitté sa contrée
Laissant sa prairie morne et ses sages forêts
Pour de luxuriantes jungles impénétrées
Les pluies fades d’automne et les vertes pâtures
Ne sont que froid bouillon pour vieillard édenté
Je prie pour des vallées où jamais la Nature
Ne laisse les humains venir la tourmenter
Nous avons quelquefois ce rêve entretenu
D’un ailleurs inconnu et qui nous est connu
Sonnets. Le mauvais violoneux ne jouera que des noires
Je suis un violoneux entamant une gigue
Hélas sous mon archet triste est la partition
Car mes primes notes disjoignent une digue
Et jamais à la joie je ne fais soumission
Drôle je suis pourtant dans l’ordinaire vie
Et je passe souvent pour un vrai gai-luron
J’ai la boutade agile et la mine ravie
Un travers qui m’expose à de rustres jurons
Je ne peux m’expliquer la trahison constante
D’un archet qui devrait obéir à mes doigts
Cédant à mon humeur maussade et persistante
L’âme exhale alors un air de mauvais aloi
Cette triste nature est-elle incontestable
Ou est-ce à mon humour l'équilibre acceptable
vendredi 18 juillet 2014
Sonnets. Comme la baleine le Poète a des bosses
Qui n’a jamais perçu l’amer chant abyssal
Des baleines bossues léviathans qui gémissent
De profundis issu du silence démersal
Ces lamentos marins du spleen sont les prémices
Ces chants seraient en fait une invite à l’amour
Un refrain sirénien aux accents érotiques
Pourtant on y perçoit le pleur d’un troubadour
L’infinie nostalgie d’un appel hypnotique
Sur la grève proscrit le vrai poète écrit
Des vers qu’il a trouvés en creusant dans le sable
Tel le vent emportant ses peines et ses cris
La vague veut gommer la rime impérissable
Sa plume il a trempé en l’ambre spleenétique
Dissipant le poison d’un tourment poétique
jeudi 17 juillet 2014
Sonnets. Le bocal des poissons rouges
Voyez dans leur bocal tourner les poissons rouges
Ce vase clos de verre est leur claire prison
Comme eux nous n’avons pas d’obstacle à l’horizon
Et si nous avançons cette ligne aussi bouge
Nul ne peut embrasser d’un seul regard le monde
Nous nous pensons libres devant l’immensité
Le Ciel rit de ce manque de sagacité
Nous voyant progresser sur cette boule ronde
Revenant au terme d’un sphérique périple
Jusqu’au point de départ sans aucun demi-tour
Et fort désappointés par l’éternel retour
Il est donc des bocaux de dimensions multiples
Au final on y tourne en rond le plus souvent
S’enivrant dans une vaine course en avant
mardi 15 juillet 2014
Sonnets. Arrêtons les frais…
Sur la place nimbée de feux multicolores
Guirlandes entamant le néant de la nuit
Un peuple agglutiné assemblage fortuit
Répondait à l’appel de l’annuel folklore
Mais l’été frissonnait des ondées insolites
Venant l’après-midi pour chasser la chaleur
Menaçant la soirée d’un ciel gris de malheur
Avant que sous l’effet d’un souffle il se délite
Assis à banqueter sous ce froid maléfice
Les festoyeurs riaient de ce treize juillet
Se trouvant en été revêtus de gilets
En attendant le bal et le feu d’artifice
Shaman des soirs passés dandy des grands chemins
Dans la nuit j’ai dansé sans penser à demain
Sonnets. Les termites creusent d’horribles galeries
Les termites des ans pensent me tourmenter
Rongeant forant perçant à travers la charpente
Qui soutient l’édifice aujourd’hui fragmenté
Du récit de ma vie où ces nocifs serpentent
Le toit et les planchers croulent avec fracas
En mêlant mes années par leur travail d’insecte
D’autres se morfondraient n’y voyant que tracas
Dans les gravas je ris lorsque je les inspecte
Car je peux relier le proche et le lointain
Comblant les oublis causés par les galeries
Je réécris ainsi tous ces instants éteints
Colorant le chagrin de tons de drôlerie
Sur les ruines d’avant dans les feux estivaux
Laissez-moi ébaucher des souvenirs nouveaux
avec le concours de Max
Sonnets. Vestiges des enjouements
Les manèges du parc sont encombrés de ronces
Bouffés par l’oubli et l’herbe folle à loisir
Le flâneur singulier rapidement renonce
À ce lieu à présent visité sans plaisir
Ses appels risibles demeurent sans réponse
Et du joyeux passé il ne peut rien saisir
Sinon quelque image vieillotte et absconse
De manèges figés que les ans font moisir
D’un temps éteint dont il ne reste plus une once
Où s’est enfui le charme qui nous faisait rosir
Les hordes du néant ont surgi sans semonce
Saisissant à jamais l’ancien parc de loisirs
Sur le passé rasé le temps peut pavoiser
Subsistera le goût de mon premier baiser
avec le concours de Doisneau
vendredi 11 juillet 2014
Sonnets. Le parchemin des vies n’est rien qu’un palimpseste
Lorsque nous aurons bu bien plus que de raison
Que les chants de la nuit nous noieront de silence
Aurons-nous cure encor d’un amour de saison
Qui a jadis vaincu nos piètres vigilances
Nous trinquerons joyeux dessous les frondaisons
Riant du temps présent simulant l’indolence
Sur la terrasse ombrée vrai cœur de la maison
Nous nierons Dieu la mort d’une feinte insolence
La tendre fleur se fane avant la nouaison
Et les fruits automnaux clament avec violence
Que lointains sont les temps des chaudes fenaisons
Le vent transit l’été sans nulle nonchalance
Aussi nous faut-il boire avant ce vent funeste
Enivrons-nous gaiment et rions-nous du reste
Le parchemin des vies... © Mapomme
avec le concours de Bruegel l'ancien et de Bernt Nokte
jeudi 10 juillet 2014
Sonnets. À quoi rêvent les chiens dans l’ombre de la cour
Les chiens dorment à l’ombre et lorgnent vers les cieux
D’un pesant bleu de plomb où plane un maléfice
C’est un désert d’azur privé du bon office
Des nuages de pluie et de leur don précieux
Qui aurait supposé qu’endormi silencieux
Un chien rêve d’ondée et prie pour ce délice
Lapé tel le nectar consacré d’un calice
L’eau est le sang divin paradoxe audacieux
Une cigale chante en bon sorcier indien
Dans l’immobilité du mi-jour hypnotique
Quand le monde est saisi d’un somme méridien
Le soleil irradie la terre indigotique
Mais les rêves de chien n’ont rien de rimbaldien
On y voit des tropiques sans astre despotique
mercredi 9 juillet 2014
Sonnets. La Terre est toute ronde et l’horizon sans fin
Je suis parti un jour sans rien préméditer
Pour marcher sans halte jusques au bout du monde
D’un pas souple et léger sans voir l’absurdité
D’un tel projet exécuté dans la seconde
Le bout du monde n’est pas le bout de son nez
C’est au bout de tout par-delà les mers profondes
Dit du bout des lèvres vous serez étonnés
D’être au bout du rouleau face aux mauvaises ondes
À bout de force et de nerfs sans en voir le bout
Les amis j’ai brûlé par les deux bouts la chandelle
J’ai déploré de n’être pas un marabout
Oiseau grégaire se nourrissant d’asphodèles
Ou de buller sur ma branche tel un hibou
Qui à son bout de terre a su rester fidèle
dimanche 6 juillet 2014
Sonnets. Le merle du parc
Le feu du jour mourrait et l’ombre s’allongeait
Dans le parc dépeuplé à la vaste pelouse
Un mâle remâchait un saumâtre rejet
Ô persifleur printemps qui sans arrêt nous blouse
Un implacable chancre en cet instant rongeait
Son cœur enivré par la nouba andalouse
Adieu amour baisers et absurdes projets
Succombant à la faux des déités jalouses
L’air printanier tranche toute idylle naissante
Même si flûte un merle apparemment joyeux
Voulant charmer sa belle insensible et blessante
À l’Angélus drapé d’un bleuté camaïeu
L’Amour tremblote sur la branche sénescente
Alors triste est le merle et son cœur rocailleux
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